Erwan Bargain : « Qui soliloque ? Et autres solos » HermineHermineHermineHermine

Il y a la poésie qui se lit. Celle qui se dit et se déclame. Il y a aussi celle qui peut tout faire à la fois. C’est le cas de la poésie du Breton Erwan Bargain.

Les textes de son nouveau recueil peuvent aussi bien se lire tranquillement dans un fauteuil (ou assis quelque part dans l’herbe) qu’être déclamés sur une scène de théâtre. Le petit avertissement qui inaugure son recueil est, à cet égard, très explicite : « Ces solos poétiques, indépendants les uns des autres, ont été écrits pour un (ou plusieurs) comédien (s) et un (ou plusieurs) musicien (s). Ils peuvent être joués séparément tels des petites formes, des impromptus ou bien faire l’objet d’un spectacle à part entière ».

De quoi  nous parle Erwan Bargain dans ses soliloques ? De tout et de rien (ou plutôt de tous  ces petits riens qui font le sel de la vie). Il nous parle aussi bien de ses enthousiasmes que de ses désillusions. Il s’interroge sur notre époque : « Plus tard, nous dirons/Notre mère la Terre/Ne nous a jamais appelés par nos prénoms/Nous avons joué avec elle/Comme on frappe dans un ballon/Nous étions supporters de nos propres destruction ».

 Erwan Bargain nous dit avoir « lu La Boétie, Calaferte et Michaud », ce qui nous indique assez le large éventail de ses tropismes littéraires. Il n’était pas né quand le jeune Yvon Le Men déclamait sur les estrades : « Je veux un langage manuel dont les hommes se souviendront quand ils seront malades ».  Mais aujourd’huiBargain écrit : « Je veux des mots/Qui s’entendent de loin/Qui me tirent vers le beau » (…) « Je veux des mots/Qui subliment et comblent/Les trous béants/De nos cœurs d’artichaut » (…) Et aussi ceci : « Je veux des mots/Qui rock/And Roll ». Pas étonnant pour quelqu’un qui vient de co-fonder Arion Rufus, formation qui manie rock et Spoken Word.

Erwan Bargain est d’abord un homme du langage. Des mots, du verbe. Il est du côté de ceux qui le privilégient dans l’expression poétique. Le langage est premier comme il l’est chez les adeptes de l’OuLiPo, cette école littéraire dont il se revendique au passage : « Je veux des mots/Qui lolipop/Qui LouLiPo/Qui Raymond/Et qui Queneau ». Il aime donc les jeux de mots, les assonances comme les allitérations, les mots qui choquent et s’entrechoquent sous les plafonds d’une scène de théâtre ou d’une salle de spectacle (comme le ferait le slam ou le rap). « J’ai des briques et des brocs/Et quelques idées dans le paddock/Que je trique que je troque/Pour survivre comme un nazebroque ».

Pierre TANGUY
Qui soliloque ? Et autres solos, Erwan Bargain, éditions Caractères, 70 pages, 10 euros.

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Edito

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