À sortir le 3 décembre en deuxième partie de soirée sur la 3-Bretagne. Un beau film. Un breizh-movie comme on en voudrait tous les soirs en début de soirée. Denez Prigent est ce chanteur magnétique qui a scotché ce dimanche soir une salle pleine du cinéma l’Arvor à Rennes. L’avant-première fut une communion.
Il est rarement donné de voir en vrai la voix. Et qui plus est une voix nue, sublime, venue du ciel et qui y retourne tout droit. La voix de l’ange est à voir, en gros plan, dans un film d’un bout à l’autre !
Denez dit si simplement, si humblement aussi, la fabrique de la gwerz, ce chant sacré que le mot complainte réduit sans la définir. Disons que la gwerz vient de loin, passe par lui, sa voix, son corps, retrouve le vent du large, frise les roches brunes, souffle d’intensité sur les îlots du large. Par exemple ceux de Santec, puisque l’homme est de là (Homme, Den en breton, Enez, île…) !
Santec est son île, son continent, son monde. Il en est parti, ne l’a pas beaucoup quitté. Son accent a été moqué au lycée Kerichen à Brest, il l’a gardé ! Son surnom à Santec était Ti-Den, la sorte de petit homme s’en fout pas mal, il a une voix qui couvre aujourd’hui l’océan, lui qui, ado, faisait chauffer la mob derrière le mur de l’église, sans pot de préférence.
C’est aujourd’hui au silence qu’il aspire, le silence qui l’inspire et mieux, le silence qu’il arrive à chanter. Entendez cette voix-là comme un silence sublimé.
Le film offre à voir une musique de Bretagne, est-ce qu’on peut dire d’une vraie Bretagne ?
Le rythme du documentaire nous permet d’avoir, par moment, le pied qui bouge. Les instruments de bouche ou d’archet sur la voix du chanteur font frissonner. Le film offre à voir une musique de Bretagne, est-ce qu’on peut dire d’une vraie Bretagne ? C’est qu’il y en aurait une fausse ! Denez Prigent nous dit le contraire car son chant touche au temps, vibre, main sur l’oreille, pavillon en extension, avec l’éternel. Il nous dit dans le film le sens de notre fameux Kenavo. Une sorte d’au-revoir certes, mais qui dit que le temps est ouvert, la rencontre possible, les retrouvailles un destin. Tant que nous serons, tant qu’il y aura le temps…
Denez Prigent dit que le vent du large est thérapeutique comme l’a été l’accouchement de ce film. Il semble étonné qu’un documentaire lui soit consacré. Il l’a accepté parce que, dit-il simplement, c’est tombé au bon moment. Au moment où il tournait une page ! La cinquantaine ? À d’autres….
Ce chanteur un peu timbré qui croit au ciel
On entend l’émotion de Denez dans l’église de Santec qu’il retrouve. On voit parce qu’il voit sur le haut des prie-Dieu les mains labourées de rides des anciens laboureurs. On entend parce qu’il entend leur prière. Alors, sous la voûte, son chant jaillit, le chant de Santec. Dire que Denez s’est signé prestement avant de passer sous le porche n’est rien que narrer le documentaire. Ce qu’on y a vu !
Ce qu’on y apprend de ce chanteur un peu timbré qui croit au ciel, attend les retrouvailles avec Stéphanie, et, en attendant, continue de lui être fidèle en écrivant ce chant sacré qui le réunit. La gwerz réconcilie son âme et son esprit, son être intérieur et sa peau, le ciel et la terre, et, souvent nous qui l’écoutons. Denez donne à voir sa surprise, y compris celle face à la vérité de dieu. Denez, le chant magnétique est un film pour le découvrir et pour qu’il se découvre.
Ceux qui le connaissent, Tiersen ou Eicher, Brault ou Brossard
On le voit sur des scènes mythiques, anthologiques (Les Trans, Carhaix..). Il est présenté par ses équipiers, ou ceux qui le connaissent, Tiersen ou Eicher, Brault ou Brossard, l’approchent, habillent sa langue. Rap, techno, blues. Denez veut bien de tout, il accepte entre ciel et terre tous les arrangements, jusqu’aux souffles haletés de Krismenn.
Engageons-nous car nous sommes engagés : quelle que soit la musique, quel que soit l’arrangement, les accompagnements, quels que soient les paris du chanteur, nous le préférons au plus près de lui, en dépit de tout, ouvert au silence, chanteur a capella. Il se dit conservateur dans le film, c’est nous cher Denez qui le sommes !
Vous, si débarrassé de tout, si pur, qu’un ange vous traverse.
Gilles CERVERA
« Denez, le chant magnétique », le 3 décembre 2018 en deuxième partie de soirée sur F3 Bretagne
Film de 52 mn produit par Mille et Une Films, écrit par Laurent Jézéquel et Gilbert Carsouxt