Révélé au grand public avec ses chroniques sur France Inter puis sur Canal+, Pierre-Emmanuel Barré a le vent en poupe. Il n’en a pas pour autant abandonné la scène avec son one man show et sa pièce de théâtre « Full Métal Molière ». Mieux, il s’apprête à investir le monde du web avec de nouvelles chroniques extraordinaires : « La fabuleuse histoire du monde raconté aux fils de pute ». Un programme riche et prometteur que son humour décalé, absurde et parfois clash et trash doit peut-être a cette liberté de penser qu’on en commun les bretons. Surtout quand les carabins ne sont jamais loin… Rencontre sage et matinale.

Vous avez fait deux années de biologie… Comme un autre breton, Albert Dupontel qui a fait médecine, est-ce que votre humour noir vient des sciences ?
Ma mère est médecin… Et quand tu bosses aux urgences, t’es obligé d’être un peu décalé. Du coup, il y a cet humour un peu cru qui a toujours été dans la famille. A défaut d’être dans les gènes, c’est dans l’éducation en tout cas ! J’ai tendance à rigoler de ces trucs là, davantage que la plupart des gens. En revanche, je n’aime pas dire que c’est un humour trash, ça renvoie à de la provocation gratuite. Ce qui n’est pas le cas, même si à la télé comme à la radio il s’agit de fournir du contenu en permanence. Et le jour où t’as une gastro ou la grippe, t’en fais un sketch, c’est gratuit… Mais bon, t’en profite aussi pour dire qu’il y a beaucoup de merde à la télévision. Quand tu dois fournir en permanence, il y  des semaines où tu es moins inspiré !

Comment un breton arrive à percer sur les scènes parisiennes malgré la quasi absence de cabaret dans son pays ?
On monte rapidement sur Paris ! Après le bac, j’ai fait bio à Rennes 1, Beaulieu. Ça n’a pas duré longtemps : Rennes n’est pas le meilleur endroit pour faire des études, ça a été la fête pendant deux ans. Comme il fallait faire quelque chose je suis monté à Paris où mon frère faisait médecine. Je me suis installé chez lui. J’ai suivi les cours Florent comme tout le monde, je me suis retrouvé au chômage comme tout le monde et j’ai enchaîné sur un peu de théâtre « pas payé » comme tout le monde. Comme on ne me proposait pas de rôles, j’ai décidé d’écrire mes textes, j’ai fais un premier One Man Show « Sale Con » avec une vingtaine de représentation, puis je suis passé à l’écriture d’une pièce « Full Métal Molière » et un second One Man Show en 2011. Mine de rien, la pièce de théâtre, ça fait 5 ans qu’on l’a joue !
On nous a d’ailleurs proposé d’en faire un film. Ce serait marrant d’avoir un DVD de la pièce qu’on a écrit à 25 ans (ndlr : la pièce a été écrite avec Bruno Hausler)

Comment êtes vous arrivez sur Canal+ ?
Par France Inter. C’est la femme du Rédacteur en chef de Canal qui écoutait France Inter et qui au moment des castings lui a dit de m’auditionner. Comme je me méfie de la télé, il y a énormément de merde et on n’a pas le droit de dire grand-chose, j’ai gardé tout ce que j’avais à côté, le One Man Show et la pièce. Si jamais j’étais censuré où si ça devenait pénible.

Vous êtes censuré ?
Très peu. Je fais relire mes papiers avant bien sûr. Il y a parfois des négociations de 3 ou 4 heures pour une blague… Mais ils ont tendance à accepter. Je n’ai pas à me plaindre. Je suis le mec le plus libre de la télé, surtout à 13h40 ! Je le vois bien, j’ai des potes sur d’autres chaînes qui n’ont pas le droit de dire « pédé », mais « homosexuel ». Va faire rire avec « homosexuel » !

L’année dernière, vous assuriez une quotidienne sur Canal+. Aujourd’hui, vous ne venez plus que le vendredi… Pourquoi ce changement de rythme ?
Avec Arsen mon co-auteur sur les chroniques l’année dernière, c’était 9 heures d’écriture par jour pour un sujet de 3 minutes. Le rythme n’était pas évident : être présent à 9h du matin à Canal+, quitter la chaîne à 14h et avoir 9h de boulot derrière. Même si j’ai réutilisé pas mal de matière, au bout d’un moment on est à court et j’ai demandé à passer en hebdo. Autrement j’aurais divorcé. Pour tenir ce rythme, il faut être célibataire et habiter au dessus des studios !

La notoriété de Canal+ vous a ouvert des portes ?
La grande différence, c’est que les gens viennent me voir sur scène et qu’ils connaissent mon humour. Avant, il m’arrivait d’avoir des salles d’abonnés. Je ne les faisais pas forcément marrer. Ce n’était facile ni pour eux, ni pour moi.

Quelle différence entre le One man show, la radio et la TV ?
La télé, on est obligé d’être très efficace. A la radio, on peut se concentrer sur le fond et se contenter d’un paragraphe avec une blague à la fin si on veut. A la télé, on a presque un quota de rire toutes les 15 secondes. Sur un One Man Show, on a davantage de temps d’installer les trucs et de les jouer. Le rapport avec le public est également important. L’écriture compte un peu moins. J’accorde beaucoup de place à l’improvisation. Quelqu’un qui a un rire génial, ça va te faire tout un spectacle. Tous les passages avec son rire vont être plus drôles que le reste du spectacle. Au total se sont trois exercices complètement différents. Il y a aussi la pièce qui est encore autre chose. Pourtant, au bout de cinq ans, tout en restant dans le cadre des personnages, il y a un peu d’improvisation : on essaye de se surprendre les uns les autres.

La nouvelle génération d’humoriste nait de plus en plus sur le Web (les fameux vlogeurs)… Quel est votre rapport au web ?
J’ai tourné quelques vidéos à Rennes avec des potes. On les a enlevé depuis, c’était assez nul ! Là je m’y remets. Mon pote Bruno Hausler monte la chaîne Youtude « Dafouk ». On va faire des sketches à deux. Ça va sortir fin janvier ou début février et ça va s’appeler : « La fabuleuse histoire du monde raconté aux fils de pute » sur le principe de la « Fabuleuse histoire de la table », « La fabuleuse histoire de la petite cuillère », etc. C’est de l’absurde. Là on vient de tourner « La fabuleuse histoire des nourrissons » où avant les gens naissaient adultes, les femmes perdaient l’usage de leur vagin après la naissance… On a une quinzaine de vidéos déjà prêtes.

D’autres projets à venir ?
Je ne sais pas ce que je vais faire dans 6 mois. Pour l’instant tout est arrivé par hasard, sauf ce que j’ai écrit bien sûr. Peut-être que Canal va me proposer de rempiler ? Je ne sais pas. De toute façon, j’ai le Web. C’est bien. Je ne veux pas me retrouver enfermé dans une seule activité. Mon type d’humour, l’absurde, passe défilement à la télé. Du coup, j’essaye de multiplier les projets pour ne pas être catalogué. Avec un problème cependant : dès que tu fais autre chose, on considère que c’était mieux avant. Alors, je passe de l’un à l’autre régulièrement pour que tout le monde soit habitué au changement !

Peut-on rire de tout et avec tout le monde ?
Moi je peux ! Il faut que ce soit drôle tout simplement. Je pars du principe : « On rigole et on verra bien après ! ». Mais, j’ai déjà eu des petites mises en demeure du CSA, la ligue des Droits de l’Homme de Corse, des associations d’Arménien, etc.

Et jamais d’humour sur les Bretons ?
Si, j’ai fait un spécial Bretagne à mes débuts sur Canal: le piège à breton, avec un grand bol de cidre et une cloche en verre géante qui permettait d’enfermer tous les bretons.

Quel est votre rapport à la Bretagne
Je suis né à Quimperlé où j’y ai encore toute une partie de ma famille. J’y vais le plus souvent possible, l’été, à Noël, etc. Bon l’année dernière, entre France Inter, Canal, la pièce de théâtre et mon One Man Show, ça a été Noël uniquement.

Et ce sentiment d’appartenance ?
De mon côté, j’étais très content d’arriver à Paris ! Par rapport au Pouldu ou à Lorient, Paris  a un énorme potentiel ! Mais c’est vrai que comme tous mes potes qui viennent de Province, le bruit de la ville, la pauvreté dans les rues, le café à 4€… Au bout d’un moment t’en a un peu marre. J’ai un peu envie d’y retourner. De là à m’y installer maintenant, je n’y pense pas. Ceci dit, pourquoi pas y ouvrir un café théâtre puisqu’il n’y en pas beaucoup.

Pourquoi Nantes n’est pas encore en Bretagne ?
Parce que les nantais ont un petit côté parisien ! C’est quand même assez bourgeois…

Propos recueillis par Hervé DEVALLAN

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Page Facebook de Pierre-Emmanuel Barré

La pièce de théâtre Full Metal Molière se joue tous les dimanches à 17h15 au Point Virgule à Paris avec Pierre-Emmanuel Barré, Bruno Hausler et Sébastien Chartier
Auteurs : Pierre-Emmanuel Barré et Bruno Hausler / Mise en scène : Patrick Mazet.

One man show « Pierre-Emmanuel Barré est un sale con » actuellement en tournée.
De et par Pierre-Emmanuel Barré / Mise en scène : Thibaut Evrard / Interdit aux moins de 14 ans !

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