Olivier Adam, des lisières de la ville à celle de la Bretagne HermineHermineHermineHermine

Le 20 juin, Olivier Adam a reçu à la Maison de la Bretagne à Paris le 52e Prix Bretagne pour son roman Les Lisières. Rencontre avec un écrivain devenu breton et malouin d’adoption… 


Olivier Adam, des lisières de la ville à celle de la Bretagne

Le Prix Bretagne (Priz Breizh) soutenu et financé par l’homme d’affaires Vincent Bolloré, salue un auteur breton ou encore un roman dont l’histoire se situe en Bretagne. Pour son édition 2013, le jury avait justement décidé de récompenser le 20 juin dernier à la Maison de la Bretagne à Paris Olivier Adam,  pour son œuvre Les Lisères qui se déroule en partie à Saint-Malo, une ville dans laquelle l’écrivain originaire de la région parisienne réside désormais à l’année. « Je ne suis pas breton au sens strict du terme. Il y a huit ans, j’ai néanmoins décidé de poser mes valises en Bretagne et de me laisser adopter en décidant que c’était chez moi ». Curieusement oublié des « grands » prix littéraires de l’automne dernier malgré sa notoriété croissante auprès des lecteurs, Olivier Adam a manifestement apprécié d’avoir été choisi par les membres du jury de  la 52e  édition du Prix Bretagne composé de Philipe Le Guillou son président, des écrivains Jean Bothorel, Patrick Poivre d’Arvor, Stéphanie Janicot, Gilles Martin-Chauffier, Annick Cojean, Georges Guitton, Patrick Mahé ou encore de l’éditeur Jean Picollec.  « C’est bien d’être non seulement lu et d’avoir le sentiment d’être compris dans ce que l’on fait » a rappelé le lauréat 2013 devant ses nouveaux camarades de plume bretons.

Sentiment lointain et tenace

 Les Lisières est le dixième roman d’Olivier Adam. Paru en 2012 pour la rentrée littéraire, l’auteur s’inspire de son propre parcours pour décrire les classes moyennes vivant dans les zones périurbaines et les banlieues, ce qu’il nomme « les lisières ». Paul Steiner, écrivain et scénariste, se sent plus que jamais loin de sa vie. Quand le roman s’ouvre, il vient de déposer ses deux enfants qui lui manquent déjà, chez sa toute récente « ex-femme », Sarah dont il est toujours amoureux. A la demande de son frère, il doit quitter la Bretagne, son lieu de résidence, pour aller en banlieue parisienne s’occuper de son père car sa mère est hospitalisée. Paul Steiner voudrait comprendre d’où lui vient ce sentiment aussi lointain que tenace, d’être toujours à la lisière du monde. « Ce beau roman intitulé Les Lisières au pluriel, parle des lisières générationnelles, sentimentales, affectives, géographiques. Ce terme de l’orée,  de la démarcation, de la délimitation apparait sans cesse dans ce livre. Un roman ample avec des personnages, des paysages, une justesse et une économie des mots qui nous a également beaucoup plu. Roman d’étendues et de portraits disséqués, qui a manifestement la volonté très claire d’être en écho avec la préoccupation du temps. Avec Olivier Adam, nous sommes décidément très loin d’un certain roman confiné » a expliqué dans son hommage Philippe Le Guillou le président du Prix Bretagne.  

Auteur prolifique

Né en 1974, Olivier Adam est l’auteur prolifique et déjà largement reconnu d’une vingtaine de livres et d’œuvres pour la jeunesse. Son premier roman, Je vais bien, ne t’en fais pas a été adapté pour le cinéma par le réalisateur Philippe Lioret (pour qui il a également signé le scénario de Welcome, film engagé et sensible sur le thème des migrants avec Vincent Lindon), tout comme Poids léger (adapté par Jean-Pierre Améris) et Des vents contraires (adapté par Jalil Lespert).Pour parfaire ce beau parcours littéraire et cinématographique, Passer l’hiver a quant à lui reçu le Goncourt de la nouvelle en 2004, A l’abri de rien, le prix France Télévisions 2007, et enfin, Des vents contraires, le prix RTL-Lire 2009. « Toute la thématique du livre qui se déroule un bon tiers à Saint-Malo repose sur : où est-ce que l’on trouve sa place lorsque l’on est en permanence porté par le sentiment d’être en lisière ? Cette difficulté existentielle se résout pour le personnage à Saint-Malo qui lors de son arrivée dans la cité corsaire a l’impression de rentrer enfin chez lui après des années d’exil. Le livre entier est porté par cette forme d’enracinement et par le fait d’avoir enfin trouvé un chez soi que l’on s’est inventé. Au fond, le fait d’expulser les gens qui font la société d’une ville en ses lisières est un phénomène que nous constatons dans les grands centres urbains et leurs banlieues, mais qui existent aussi dans des villes en apparence prospères comme Saint-Malo. Nous arrivons à ce paradoxe que les gens qui font leur ville ne peuvent plus y vivre notamment en raison de la montée inexorable du marché immobilier. Du coup, poussent un peu partout de nouvelles lisières, des espèces de lotissements au milieu des champs de choux. La côte et le littoral sont pour moi  des façades qui cachent bien souvent des réalités plus modestes, parcourues par des tensions sociales et économiques que l’on retrouve désormais partout sur le territoire » souligne avec conviction l’auteur.

Une adaptation pour le cinéma

Dans quelques mois, le roman d’Olivier Adam devrait être une nouvelle fois adapté puis porté à l’écran par Philippe Lioret à qui l’on doit en Bretagne l’Equipier, le film avec Philippe Torreton, Sandrine Bonnaire et Grégori Dérangère qui dépeint sur fond de passion amoureuse l’ambiance et les caractères si particuliers de l’île d’Ouessant dans les années soixante. Juste le temps pour les lecteurs d’engloutir cet été les 450 pages de ce roman dense et intime, quelque part sur l’immensité de la plage du sillon entre ressac et brise-lames, à la lisière revendiquée de la France et de la Bretagne, puisque ni Français, ni Breton, mais Malouin suis…

David Raynal

Encadré

Les origines du Prix Bretagne

Fondé en 1961 par des Bretons de Paris, autour de Pascal Pondaven et Charles Le Quintrec, directeur et rédacteur en chef de l’hebdomadaire La Bretagne à Paris, le Prix Bretagne, a compté dans son jury des personnalités aussi prestigieuses et importantes que Jean Marin, Hervé Bazin, Paul Guimard, Henri Queffélec, Roger Nimier ou Gwen Aël Bolloré. En plus de cinquante ans d’existence le Prix Bretagne a eu l’occasion de distinguer de grands écrivains bretons ou amis de la Bretagne, Pierre Jakez Helias, Xavier Grall, Eugène Guillevic, Jean-Edern Hallier, Michel Morht ou plus proche de nous, Yann Quefellec ou encore Mona Ozouf. Soutenu et financé par l’homme d’affaires Vincent Bolloré depuis 2001, le Prix Bretagne (Priz Breizh) est actuellement doté d’une récompense de 6100 €.

D.R



Les Lisières, Flammarion, 450 pages, 21 €

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Edito

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