La Compagnie Ocus, après avoir été en résidence trois ans dans le beau château ruiné de la Chapelle Bouëxic, a déplacé ses caravanes, chapiteau et dancing dans la Communauté du Val d’Ille. À St Germain qu’ils vivent et pratiquent désormais leur théâtre singulier, alliant au quotidien le vent et ses dictées ! Nous avons assisté à l’avant-première, vendredi 27 septembre de leur Bistrodocus, démonstration !


Tous à table ! Est-ce du théâtre ? Du cabaret ? Des chansons, hauts les cœurs,  des rythmes et des cris, hauts les cuisses, tape-fesses, des baffes et des chutes, n’est-ce donc pas aussi du cirque ?

Le barnum Bistrodocus tient de tout cela, qu’on se le dise, et n’aille pas y voir pour y trouver le silence, sauf le faux qui dure moins d’une demi-seconde !

On s’attache aux personnages, diva divine et grasse, appelez-la Didier puisque c’est son prénom, sortie de sa bassine ou née de mille et quelques jours, œuf de poule et mécanismes aidant, à chaque coup l’œuf tombe pile, et sans faire d’omelette ! La date de préemption des produits, saveur comprise, ici n’est pas la question : tout est à vif ! Les marteaux cognent ou les culs de bouteille en farandole dansent dans le noir, la magie donne et nous on dîne ! L’assiette est pleine et le chapiteau d’Ocus, sous l’orage de St Germain sur Ille en cette soirée de première, c’est aussi dedans qu’il gronde !

On pourrait craindre le pire dans ce décor qui tourneboule, entoure le spectateur, l’enserre sans l’emprisonner, or les paratonnerres sont des fourchettes et la foudre est poétique. Il y a de la musique parce qu’il y a trois musiciens, Philippe Catherine inspire leurs voix et le trio siffle quand il faut ! Ce fouchtra, c’est du théâtre puisque s’y nouent des dialogues, c’est un repas puisqu’on nous sert et quel service ! Les bols volent et, quand ils tombent, ils cassent !

Léon est un maitre de cérémonie, ne retenez pas la date de son anniversaire, elle change chaque jour dit de représentation. Ça se termine en cartoon, en chantilly sur le nez, dans ce bazar, quoi, sinon de la vitalité !

Comme son nom l’indique, le chaos vient de loin, et donc des monstres le hantent. L’animalité et la vitalité font ici bon ménage. Grognement, ahanement, le singe descend de l’acteur et l’homme monte aux cintres. À n’en pas douter, on peut ici douter de tout. Nous sommes au cabaret, donc à table, on mange et on mâche, le mélange des genres incite à l’indulgence ! Le bistro est un univers et la troupe qu’on voit saluer à la fin du spectacle est spectaculaire, si nombreuse puisqu’elle comprend les stagiaires et les cuistots, preuve que la toque ne couvre pas les plus toqués !

Ocus est une Compagnie qui fête ses dix ans, jeune et mirobolante donc ! C’est un collectif d’âmes et tout les divise donc tout les réunit ! Leur communauté est démonstrative mais ils y insistent, le spectacle n’est cathartique ni pour eux ni pour nous ! Tiens donc…
La poésie de ce bistrot remporte les suffrages. Il y a la soupe, donc du bon, coriandre s’il vous plait, et du moins bon: la bagarre est trop longue et les claques pèsent comme déclarations de guerre sous les préaux d’école.

On le sait, on l’a remarqué, le monde est un chaos et Ocus nous l’assène, tentant malgré tout d’essayer. Ils essaient. Les acteurs se déchaînent, leur énergie est à revendre, il y a tellement de ressauts émotionnels que le sismographe, par moment, ne tient pas le coup. On dirait que les louches s’emballent, qu’on s’emmêle les couteaux, autant dire, ils en font trop !

Mais aussi, on le dit ainsi parce qu’on aime cette volatilité et cette vitalité survitaminée. On a simplement peur qu’en en faisant des tonnes, la diva sur la civière ressuscite ou que le bébé électrique ne se rendorme pas. Quant au pantomime de Léon, bravo les artistes qui deviennent des chiffons et les chiffons qui devraient parler plus clair, glousser moins fort, rire moins faux. C’est cela qu’on cherche à dire. Que même en remontant le temps et partant du pariétal, le théâtre exige du texte, des phrases, des mots, moins de gloussements, moins de glapissements ou de grognements ou, sinon, ceux qui mangent dans le sombre, pourraient craindre de trouver dans la bonne soupe un os !

Le théâtre d’Ocus est animalier et son zoo réfère à Deschamps au temps du Lapin agile ou à d’autres, oscillant entre le théâtre de rue et l’opéra de Quat’sous !

Le Bistrodocus nous a tant plu qu’on peut lui dire qu’on reviendra à sa table, attendant que Victor Hugo dessaoule, ou Jean Sarine ! Les alexandrins sont beaux et longs en bouche, les couinements plus courts. Les cris du saxo s’avèrent des plaintes transcendées, les tableaux simiesques nous regardent et s’inversent : cet art de récupérer les déchets plait.

Cet arte povera est voulu, feint mais pas forcément fin ! S’y juxtaposent le lyrisme des corps et celui du burlesque, le slam subtil et le gros du grotesque, encore un effort, tendez mieux l’oreille, le Bistrodocus atteint au murmure quand le public chante happy birth Léon !

À St Germain sur Ille, où les milles fourchettes tournent comme des toupies, attablez-vous au Bistrodocus où on n’avale pas que des paroles.

Les nuits chuchotent y compris quand l’orage gronde !

Gilles Cervera

Le Bistrodocus

Les premières du nouveau spectacle de la Cie OCUS :
vendredi 11, samedi 12, jeudi 17 et vendredi 18 octobre 2013 à 20h à Saint-Germain-sur-Ille
Réservation obligatoire 
: 02 99 69 21 78 – [email protected]
Tarifs (repas compris)
: 20€ plein / 15€ réduit (étudiant, demandeur d’emploi) / 10€ enfants (8 à 12 ans)
Y venir le ventre vide !


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Edito

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