A 50 ans, Pierre Gaucher ose présenter ses œuvres. Ni peintre ni photographe, donc les deux ! il invente, bouge, floute les frontières, il montre le poreux, il regarde. Sortant d'une exposition à la Baule où il a travaillé avec l'auteure Jeanne Benameur, l’artiste se prépare pour l’Aire Libre de Chartres au printemps. A Rennes, ses œuvres sont exposées de façon permanente à la Galerie du parlement.

Métier : regardeur et remonteur. Il remonte le réel après l’avoir démonté. Il agence ses bribes, recolle ses morceaux, il regarde en deçà du regard. Soit donc avec l’appareil photo qu’il utilise comme le pinceau, soit avec l’acrylique qu’il photosensibilise.

Pierre Gaucher ne truque pas, il détraque. Ce que l’on voit est ce que l’on a vu, à ceci près qu’entre ce qui est visible et ce qui ne l’est pas, l’artiste met son filtre.

Gaucher est à suivre d’expos en expos, caméléon des formes, derviche tourneur des images ! Il prend les mots de l’autre, emprunte à l’écrivain -récemment Jeanne Benameur, il pousse le voyage comme une métaphore. Pierre Gaucher regarde de l’intérieur, et c’est le monde qu’il décadre et nous rend. Des fois, c’est flou, des fois, c’est net. Des fois, on reconnaît Rennes, Pacé où il habite ou Londres et Reykjavik, parfois une aurore boréale s’écrase sur le pare-brise, ou sur la vitre de l’autocar c’est son œil qui fait la buée. Gaucher a l’œil ébloui, il a la lumière crue, la couleur criarde. Le monde est fluo et ceci n’est pas le monde, c’est pire !

Les routes ont des lignes roses. Les sangliers sont coupés net. Le ciel a des angles rouges, pardon, c’est un goéland qui le traverse. Gaucher, contrairement à ce qu’il pourrait donner à croire, n’est pas un trafiquant du photoshoping ni un Warhol des posters, il regarde, prend fait et cause pour le regard, un point c’est tout. Il fait le point et c’est tout.

Homme d’images où l’image est sans hommes, ou si peu. Plutôt des silhouettes, des bêtes, des rires enfantins ou une robe de femme bleue. Pierre Gaucher nous force à voir de l’intérieur : une loupe qui ne se loupe pas. Lorsqu’il voyage, il est toujours avec lui-même, à sa recherche. Prouvant l’instant, le moment décisif, qui recadre la réalité.

Pierre Gaucher met le regard sur orbite et il vous fonce dessus : il nous rentre dedans !

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