Cristina Isabel de Melo Cahiers de respiration : poésie d’air HermineHermineHermineHermine

Pas ici de parole en l’air ! Car cette poésie dont on parle est aérienne, ouvre les mains du ciel, ondoie, elle monte en volutes, elle ne joue pas avec la lumière, elle est lumineuse. Si les lucioles écrivaient, ce serait du Cristina Isabel de Melo !

Poésie d’airNote : 4 sur 5

Cristina Isabel de Melo est comme son nom l’indique née ailleurs, plus loin, dans d’autres Finistères. Bien que nous soyons, au fond de nous, persuadés que tous les Finistères sont les mêmes, rocs face aux flots, falaises hautaines qui en ont vu d’autres et attendent le mariage éternel de la pierre et de l’eau, du sable, des vases et de l’air. Ce dernier est le témoin, l’air lusitanien pour cette poète dont on parle.

Poème d’ici, écrit ici, sur les cheveux verts des eaux d’Aven, cette poésie nait de Bretagne mais la poète qui parle parle à l’universel. Respirant du large, aéré du lointain, disant au plus proche des mots, leur transparence et leur commune apesanteur. Oui, voilà : la poésie de Cristina Isabel de Melo soulève les mots, avec une brise, par moment des tempêtes et puis aussi le rire où nous retrouvons l’ami Jean (le Tardieu) qu’elle évoque.

Les cahiers de respiration qui sortent juste des éditions Vagamundo témoignent que, pour la femme qui écrit, et nous aussi, les mots aèrent : mer immense/mer argentée/ qui a des ailes / blanches / pour voler. Ce livre insuffle, ce livre infuse, ce livre infiltre, il faut se laisser aller dans sa bulle d’écume, voltiger sur les roches ou au gré des oyats bleus, ouvrir sa bouche, d’accord/avec le paysage.

On pense dans les pages blanches incisées de mots rares au blanc guillevicien. il y a le noir de Soulage et le blanc de Guillevic, maintenant celui que Melo pousse plus loin, au bord de l’essoufflement quand, combien de mots/me reste-t-il. Si l’angoisse venait, le rire viendrait à sa place. Si la peur surgissait, le piquant des jours / brode/  rode / roda.

Cristina Isabel de Melo écrit concrètement. Cet air qu’elle donne à respirer n’est pas qu’abstrait, il parle des choses qu’on porte ou de celles qui nous portent. Elle écrit pour les dire en rond, en lignes, en périgraphies, elle écrit dans son souffle et sa gorge qui décident du rythme et donc, de sa respiration. On pense aux pictogrammes d’Apollinaire, à Max Jacob aussi et ses effacements, car ici le goutte à goutte des mots nous transfuse, et surtout, surtout on écoute le chant de cette Bretagne atlantique qui nait à Faro, via Nazaré et se déchiffre à Nizon (où d’ailleurs d’autres fameux poètes ont trouvé le tempo) : alors/ poète, j’écris/mon tarot de Bretagne/un peu fado/un peu celtique/de n’être pas /de Marseille.

On sourit souvent dans cette poésie, qui ne prend jamais la pose ni des airs de poésie. Elle fait prendre l’air au poème, les mots de Melo nous écrivent.

Bref, répétons-le, souffrir ou sourire c’est respirer !

Cristina Isabel de Melo Cahiers de respiration éditions Vagamundo collection Boquim 153 pages 13 €

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