Otero, peintre engagé HermineHermineHermine

Le livre à l’affiche est un livre d’affiches. De Mariano Otero, « le plus espagnol » des peintres bretons. Le plus enragé des engagés, mais dont la rage est douce, quasi murmurée, peinte ou dessinée entre Lorca et Apollinaire.


Otero, peintre engagé

Voilà un livre d’histoire, la sienne, et celle de tellement de citoyens républicains espagnols, retirés, exilés, refoulés par le franquisme et ce qui est, à justement parlé, le fascisme. Ce mot employé aujourd’hui à toutes les sauces, ou celui de dictature, galvaudé, dévalisé aussi. Ici, l’antifascisme n’est pas un vain mot. C’est-à-dire que le sang coule, a coulé, l’histoire a roulé et Mariano témoigne, béret enfoncé et poing levé.
Le livre publié par La Part Commune est une heureuse initiative et un beau livre. Il donne à voir une époque qu’Otero a vécue autant que fantasmée, transcendée autant qu’expérimentée. Témoignent les couleurs pour que vibre l’époque, encore et encore ou les mots tracés main. Trois chapitres découpent le livre : l’Espagne, le Monde et la diversité culturelle.

Otero enchante la paix, Picasso et sa colombe passent, mais aussi les chevaux exorbités de Guernica. On voit Neruda, Maïakovski ou Machado, bref le communisme est conquérant dans les affiches d’Otero, cet idéal contre lequel s’est cognée une grande partie du monde et dont le mur de Berlin n’a pas fini, en dégringolant, de faire tomber ses pierres au fond de chacun de nos jardins.

Ces affiches racontent une épopée. On la voudrait actuelle, elle est du passé. Otero est son feu sous la cendre, ardent, et ses fusains fusent comme ses pinceaux en pincent pour qu’avant soit maintenant et l’Espagne purgée. Il n’en est rien, on le sait. Il y eut des illusions, même la movida nous a étourdis. Il y a tant de désillusions. Otero, le rennais du monde nous en dit long par sa fougue et son lyrisme, sur les épopées qui perdurent les défaites et les rêves qui perdurent le chagrin.

L’arte povera que décrit le préfacier Jean-François Botrel empreinte à « l’art éphémère des affiches », collées au mur pour tel ou tel événement et que décollent le vent ou la main des passants affichionados. L’art de la rue est du grand art. La galerie à ciel ouvert un gueuloir ! La métaphore qu’il file de congrès en conférence ou d’états généraux en carte de vœux fait de ce livre un récit plus que rennais, universel.

Son engagement personnel le dépasse, preuve en est que le livre est dédié au père, et à travers ce professeur exilé de Rennes 2, Antonio Otero Seco, à tous les Républicains de toutes les résistances et des espérances les plus folles. Dans l’entretien que Jean Louis Coatrieux signe à l’entrée du livre avec Mariano Otero, ce dernier dit de ses affiches qu’elles sont « des gouttes d’eau ».

Rassurons-le. Les gouttes d’eau, peintes ou écrites, agies ou pensées, gueulées ou pleurées font les marées les plus jeunes et les plus alertes de l’océan. 



Affiches d’un engagement de Mariano Otero aux éditions La Part Commune, 110 pages – 35€

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Edito

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