On nous parle de déserts ruraux, de déserts médicaux, il n’y a dans certains endroits plus de services sociaux, mais rien sur les déserts culturels, comme s’il était moins grave de ne pas avoir de médiathèque ou de musée à proximité de chez soi, que de manquer d’une banque ou d’un guichet de poste qui, à l’heure d’Internet ne servent plus à rien.


La Bretagne échappe à la misère muséale de certaines régions. Citons le musée des Phares (Ouessant), le musée des Minéraux (Crozon), celui de Pont-Aven relatif à l’école picturale éponyme, ceux des Beaux-Arts de Quimper et de Rennes, le port-musée de Douarnenez, le Fonds Hélène et Édouard Leclerc pour la Culture à Landerneau, le manoir de l’Automobile à Loéhac… Qu’ils soient publics ou privés, les musées bretons sont officiellement référencés au nombre de 38 par le ministère de la Culture, soit 2,5% des sources muséales métropolitaines, entendu que Paris Intra-Muros représente à elle seule 10 % du chiffre. Pour autant, les galeries parisiennes ne sont pas les seules à exposer les plus beaux chefs-d’œuvre de la République. Rien n’est moins vrai. En voici la preuve à travers quelques toiles du musée des Beaux-Arts de Rennes, dont la collection est l’une de plus riches de Bretagne… de France… d’Europe…

Si vous faites une recherche Internet MBA Rennes, les premières œuvres à remonter dans le fil seront Le Buste d’Homme au Chapeau de Picasso (1970), l’une des dernières créations du maître disparu en 1973, et Marine Bleue avec effets de vagues de Georges Lacombe, peintre majeur du postimpressionisme dont une autre de ses huiles essentielles est exposée en Bretagne, La Mer jaune, que l’on peut admirer au musée des Beaux-Arts de Brest. Mais l’œuvre la plus célèbre du musée de Rennes est sans conteste La Chasse aux Tigres de Rubens dont Dali s’inspira pour sa célèbre Pêche aux thons.

Il faut se replonger dans le contexte de l’époque. Nous sommes au début du XVIIèmesiècle. Animés par moult récits de grands voyageurs, les monarques européens ne se satisfont plus d’une banale chasse au loup ou au cerf. Ils veulent de l’exotisme. Dans cet esprit des peuples lointains, le grand électeur de Bavière commande au Flamant Pierre-Paul Rubens un ensemble de quatre tableaux représentant plusieurs chasses. Au tigre. Au sanglier. A l’hippopotame et crocodile. Ainsi qu’aux lions. Le souci du peintre est avant tout d’avoir de bonnes illustrations afin d’emprunter les éléments picturaux nécessaires à son travail. Les zoos n’existent pas encore et les livres ont peu d’images. Comment faire ? Rubens s’inspire alors du travail d’un de ses maitres, Léonard de Vinci qui, dans  La bataille d’Anghiari, dessine une ruade de chevaux en lutte. Pour le reste, son imagination fait au mieux d’un lion, d’un tigre et autres animaux dont il ne possède que de sommaires descriptions.

Le tableau (3,24 m. x 2,56 m.) est exposé avec les trois autres au château de Schleissheim jusqu’aux invasions napoléoniennes. Officiellement considérés comme des « copies » de Rubens, Bonaparte (alors Consul de la République) les fait envoyer en France avant qu’elles soient dispersées dans les provinces pour faire oublier leur vol. La Chasse au tigre finira à Rennes. Sa possession au patrimoine national est aujourd’hui inaliénable.

© Bretagne Actuelle & Jérôme Enez-Vriad – Avril 2018
Illustration : La chasse au tigre de Pierre-Paul Rubens – 1615/1617

Liste des musées de Bretagne
Musée des Beaux-Arts de Rennes

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