Entre Slam, Jazz et Trip Hop, e-Sens creuse le sillon d’une autre musique où esthétique et poésie donnent un sens aux maux d’Erwan Bargain.
e.Sens… « e » pour électrosensuel. Il est pratiquement inutile d’ergoter davantage tant le néologisme illustre parfaitement l’univers des faouistes : terriblement moderne et urbain (leur côté slam) et irrésistiblement enraciné dans l’élégance et les grands espaces feutrés (leur côté Jazz). Le second opus « L’asymétrique » ne déroge pas à la règle et dévoile une nouvelle fois la finesse de l’écriture d’Erwan Bargain. Deux citations pour s’en convaincre : « Quand je tangue et langue / Et tango / Ego et tangue / J’élague et logue » ou encore « Pour toi fiston / J’écrirais / Des contes défaits et à refaire / Des aventures de pirates à colorier / Des récits de cow-boys / Qui au lieu de dégainer / Préfèrent lire Eluard, Brautigan et Fante ». S’il fallait se perdre dans l’exercice des ressemblances, il serait évident de citer Abd al Malik et l’inévitable Serge Gainsbourg période jazz gitane, mais également l’atmosphère éthérée de Renaud Papillon Paravel ou le rock réaliste des parisiens Mendelson. En revanche, ressemblance n’est pas copier-coller, car e.Sens distille bien sa propre petite musique. Gilles Thomas (batterie), Steven Prigent (Claviers), Nicolas Morvan (Sax, flûte, clarinette…) et Florent Jacques (Basse) arrivent à jouer (et à se jouer) avec les mots de leur journaliste et poète préféré, parfois aidé en cela par certains invités : Robin Foster, Gaëtan Fargot, Goulven Ka et Valérie Marrec. Comme une bande originale un peu folle, la musique du quatuor habille les textes d’Erwan Bargain et donne un équilibre à l’ensemble en s’imposant sur de longues plages entièrement musicales.
« L’asymétrique » prouve que loin de séparer, il assemble et rassemble les contraires dans un troublant effet miroir. Le voyage est au bout de l’effort.
Hervé DEVALLAN
e Sens « L’asymétrique » (L’OZ Production / Coop Breizh)
