Après 5 ans de silence, le trio marseillais Chinese Man revient sur le devant de la scène. Leur nouvel album, Shikantaza, petit bijou entre rap, jazz et influences world, apparaît comme un retour aux sources pour le groupe.
Shikantaza, en japonnais, signifie « rester assis sans rien faire », ce qu’il convient de faire à l’écoute de cet album riche et complexe, qui ne s’apprivoise pas facilement. Même si le deuxième titre, Liar, donne le ton et laisse présager de très bonnes choses, les 16 titres semblent durs à appréhender.
Il est vrai que, de prime abord, la somme d’informations qui arrive à nos oreilles nous laisse chaos. Tant de sonorités, tant influences, apparemment assumées et maîtrisées, donnent le tournis. Nous naviguons là entre reggae, jazz, world music, hip hop, bien entendu, et pop. Outre quelques morceaux accessibles (ce qui ne signifie pas pour autant mainstream), l’album pourrait ressembler à un joyeux foutoir. Néanmoins, ce qui en émerge, dès la troisième écoute, est une formidable homogénéité du propos. La personnalité du groupe s’avère si forte qu’elle lie tous les morceaux. Dès lors, ils s’écoulent sans heurts.
Dans le détail, les influences du combo lorgnent volontiers du côté de l’Inde, des îles caribéennes, de l’Asie, du jazz vintage, des rythmes tribaux, mais également du hip hop »à la cool », qui n’est pas sans nous rappeler Gorillaz avec ce crossover entre styles musicaux marqués, mais qui pourtant se fondent à merveille. Sans parler de l’humour que High Ku, Sly et Zé Matéo manient à merveille. En tout cas, nous le ressentons ainsi, notamment lorsqu’ils samplent des morceaux très typés (évoquant, par exemple, la série télé Zorro de notre enfance).
Ce pêle-mêle montre une incroyable technique, celles des collages sonores tous azimuts. Les divers titres ne cessent de nous surprendre, tant par la qualité inhérente aux samples en eux-mêmes, mais également par les arrangements que le combo propose. Si la prise de risque est évidente, elle s’avère payante, pour peu que la première écoute ne vous rebute pas. Le monde de Chinese Man demande à être découvert, de fond en comble, pour que la magie opère. Dès lors, de nombreuses heures de musique découlent, sans forcer. Preuve, s’il en est, du talent de ce groupe que nous ne manqueront pas de suivre sur scène : le 13 avril à Saint-Malo, le 22 avril au festival Insolent à Lorient.