Avec ce troisième album, les nantais confirment talent, passion et plaisir. Et pour nous, un plaisir certain de les retrouver en grande forme avec 10 titres Hip Hop qui partent à l’assaut de leurs intimes convictions.
Cabadzi se refuse à scinder le monde en deux. Pas de bons, pas de méchants, aucun « fuck la police » ou autres misères sémantiques. Olivier Garnier, Jonathan Bauer et Victorien Bitaudeau sont plus malins que cela. C’est ainsi que le titre « Cancre ultime » va chercher « leur » vérité au bout des mots : « La violence est leur neige de décembre et leur soleil de juillet / la violence est la prison perpétuelle de leur smartphone ». Le tout porté par un flow qui slam et prend le temps, bercé par une musique plus proche du rock et de la pop que n’importe quel combo de banlieue. Pour preuve, la petite playlist de leurs derniers émois musicaux présentée dans leur dossier de presse : Arcade Fire, Flume, Tom Waits, Radiohead, Nick Cave, etc. Et ça leur va bien.
La subtilité est donc de mise à l’écoute de l’opus, Ce qui n’empêche Cabadzi de confirmer : « Ce disque serait engagé si nous étions russes, mexicains ou chinois et qu’en sortant nous risquions nos vies ». Certes, les Pussy Riot souffrent un peu plus que les Bonnets Rouges. Même si jeter des œufs peut encore conduire en prison du côté de Nantes. Un engagement peut en cacher un autre….
C’est que « Des angles et des épines » habille sa révolte de poésie. Et le combat qu’ils mènent et d’abord intérieur : « Ce qu’on voulait montrer, c’est une photographie de nos intimités ». L’exercice est réussi puisque l’invitation qu’ils nous adressent touche au but. Mieux, le carton d’invitation est minutieusement travaillé. Si la version numérique propose deux titres bonus (« S’aimer vite » et « Bonjour tristesse »), les items CD et vinyle sont tous deux uniques et numérotés avec photos, textes, typographies… Et pour la grande galette noire, un vinyle instrumental supplémentaire et un objet personnel mis dans la boîte par le groupe lui-même. Bref, quand le beau est l’ami du bien, il est fort à parier que les 7000 exemplaires physiques du dernier album soient largement dépassés !
Hervé DEVALLAN
Cabadzi « Des angles et des épines » (Chuck Seagal Records)
